Les émaux naturels

Tout d'abord qu'est-ce qu'un émail ?

Voici l'une des définitions officielles :

"Matière fondante composée de différents minéraux, rendue très dure par l'action de la chaleur, destinée à recouvrir par la fusion, le métal, la céramique, la faïence, la porcelaine à des fins de protection ou de décoration, et prenant alors des couleurs inaltérables."

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En céramique nous réalisons des émaux à base de poudres de minéraux que nous mélangeons à de l'eau et que nous appliquons sur nos pièces en terre cuite (après une première cuisson à 980°).

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Pour ma part j'utilise du grès (une argile que je récolte) ou de la porcelaine que j'émaille et cuis en deuxième cuisson à 1250°. A cette température les émaux que je crée vitrifient les pièces, et les parties non émaillées deviennent non poreuses.

1250° ! Mais pourquoi ?

Les principaux composants des émaux sont la silice et l'alumine, qui fondent réciproquement à 1700° et 2000° environ. On y ajoute ce que l'on appelle des fondants (du calcaire ou du magnésium par exemple) qui permettent d'abaisser ces températures de fusion. Tout cela s'appelle l'eutectique si vous avez envie de creuser le sujet !

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Grâce à ces fondants, notre émail peut fondre et vitrifier les pièces à 1250° (si l'on respecte certains calculs plutôt précis). Il y aussi d'autres oxydes métalliques, comme le fer par exemple, qui permettent de colorer les émaux par réaction chimique à la cuisson, selon la proportion utilisée.

Des émaux naturels ça veut dire quoi ?

Je les appelle ainsi car une grande proportion des minéraux qui composent mes émaux proviennent de matières que je collecte.

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Au lieu de mélanger des poudres achetées dans des magasins spécialisés, j'utilise des roches et des argiles qui contiennent naturellement de la silice, de l'alumine, du fer... dans des proportions variées. Je récolte aussi les cendres de végétaux dans les cheminées de mes ami.e.s. !

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Je concasse les roches et les réduis en poudre, je réalise des mélanges de ces matières, j'y ajoute parfois des fondants si besoin, je teste et je vois ce que cela donne ! J'ai une démarche assez empirique que je confronte régulièrement à des recherches en chimie plus affinées.

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Je ne connais donc pas les résultats à l'avance et j'ai parfois de bonnes voire de très bonnes surprises ! Il arrive même que certaines roches fondent naturellement à cette température et là c'est le graal ! J'obtiens donc des teintes naturelles, douces, parfois mates parfois brillantes, et qui réagissent différemment selon que je les applique sur des surfaces horizontales, verticales ou encore rondes.

Pourquoi cette pratique ?

J'ai choisi cette façon de travailler pour plusieurs raisons :

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Tout d'abord être au plus proche de la nature, glaner avec parcimonie sans détériorer. Revenir aux sources de la poterie, utiliser ce que je trouve localement, en essayant de ne recourir à l'industrie que ponctuellement.

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Ensuite, pour revaloriser les déchets (j'utilise par exemple des déchets de roches issus d'une carrière, ou des poussières de calcaire issues de la taille de pierre) qui deviennent ainsi de véritables ressources.

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Enfin, pour ne travailler avec aucun oxyde dangereux pour la santé (la mienne comme celle de ceux qui les collectent souvent dans des conditions obscures, périlleuses voire inhumaines...).

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Et pour finir : parce que cela me passionne !